Générateurs d’aérosols
nouvelle classification à compter du 1er août 2018 pour les policiers municipaux

Publié le 02/07/2018 • Par Géraldine Bovi-Hosy • Source : Géraldine Bovi-Hosy la gazette des communes

Une clarification du classement des générateurs d’aérosols incapacitants ou lacrymogènes

était attendue depuis près de cinq ans. On guettait au Journal officiel un arrêté mais c’est en fait un décret qui est venu mettre un terme à plusieurs années d’interprétations divergentes de collectivités et de préfectures. A compter du 1er août 2018, la catégorie B8° sera effective. Mais cette nouvelle classification entraine également des conséquences non négligeables pour les collectivités. Décryptage avec notre juriste, Géraldine Bovi-Hosy.

Il aura donc fallu près de 5 ans pour que la nouvelle classification de générateurs d’aérosols incapacitants ou lacrymogènes voit le jour. Et entre en vigueur à compter du 1er août 2018.

Alors que l’ancienne classification faisait une distinction selon différents critères (produit  – poivre ou CS – volume, pourcentage – arrêté du 11 septembre 1995) la nouvelle classification, issue du décret du 29 juin 2018 opère un classement fondé uniquement sur le volume.

Ainsi sont désormais classés :

  • en B 8°: les générateurs d’aérosols incapacitants ou lacrymogènes, d’une capacité supérieure à 100 ml ou classés dans cette catégorie par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et des ministres chargés des douanes et de l’industrie
  • en D: les générateurs d’aérosols lacrymogènes ou incapacitants d’une capacité inférieure ou égale à 100 ml sauf ceux classés dans une catégorie par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et des ministres chargés des douanes et de l’industrie.

Le principe est donc simple. Peu importe le produit qu’il contient (poivre ou CS), le générateur de plus de 100ml est en B8° et celui de moins de 100 ml en D. Un arrêté ministériel pourrait cependant faire basculer un générateur de moins de 100ml, de D à B.

On rappellera que, pour un particulier, les armes de catégorie B (donc les générateurs de plus de 100 ml) sont soumises à autorisation préfectorale pour l’acquisition et la détention, alors que les générateurs en D, sont des armes dont l’acquisition et la détention sont libres pour un majeur, leur port et leur transport étant cependant soumis à motif légitime. Les motifs permettant à un particulier d’acquérir un générateur en B8° seront certainement peu nombreux.

Les conséquences pour les policiers municipaux

Depuis 2014, les textes sont clairs (article R511-12 du CSI) : les agents de police municipale peuvent être autorisés à porter des armes de catégories B8°, de même que des générateurs classés en D. Avec l’entrée effective des gazeuses en catégorie B, il reste à mettre à jour les autorisations d’acquisition et de port.

Certaines préfectures, à l’occasion des renouvellements de détention des armes par le service (tous les cinq ans – article R511-30 du CSI) avaient déjà anticipé cette modification. Pour les autres, cela se fera sans doute à l’occasion de l’ajout d’une autre arme ou lors de la prochaine demande de renouvellement par le maire. Les préfectures disposeront peut-être d’informations à ce sujet et prendront à cette occasion contact avec les collectivités. Nous ne sommes pas à l’abri d’une remise à plat des autorisations préfectorales afin de faire le point avec les maires sur l’équipement qu’ils souhaitent pour leur service de police municipale.

La question se pose également pour les autorisations de port d’arme, qui ont la particularité de rester valables tant que l’équipement de l’agent n’a pas changé et sauf caducité, suspension ou retrait. Mais sur ce point également, il y aura peut-être des changements de politique d’équipement des agents du fait des obligations de formation.

A noter que pour les ASVP, tous les générateurs étant désormais classés comme arme (B ou D) à compter du 1er août 2018, leur port est dorénavant totalement interdit, quel que soit le volume ou le type de produit.

Les formations préalables

Le changement de catégorie des gazeuses a pour conséquence des nouvelles obligations de formation.

En premier lieu, et l’ajout date de 2015, les autorisations de port des générateurs d’aérosols incapacitants ou lacrymogènes classés en B8° (donc plus de 100 ml) sont soumises à une obligation de formation (et de réussite) d’une durée de 6 heures, dispensée par le CNFPT avec des moniteurs en maniement des armes (article 1er, 9° de l’arrêté du 3 août 2007 modifié). Si l’agent n’a jamais suivi et réussi le module juridique, il devra le suivre à cette occasion (12 heures de module théorique).

La question ne se pose pas pour un nouvel agent pour lequel est sollicité le port de la gazeuse pour la première fois en police municipale : il lui faudra suivre et réussir ce module pratique.

Pour les autres agents déjà porteurs, certaines préfectures, qui ont anticipé le surclassement, ont prévu dans leur arrêté de port d’arme que l’agent s’engage à ne porter le générateur de plus de 100 ml au moment de son classement en B8° qu’après réussite de la formation. Dans cette situation, l’agent devrait donc s’abstenir de le porter jusqu’à obtention de l’attestation de formation qui sera transmise à la préfecture, mais celle-ci ne délivrera pas de nouvel arrêté. Une autre situation existe aussi : les préfectures qui mentionnent la B8° mais ne prévoient pas dans l’arrêté l’obligation de formation. A priori, l’agent reste porteur sans formation….

Comme pour les arrêtés de dotation, il serait utile de disposer d’une circulaire harmonisant les pratiques des préfectures.

Les formations d’entrainement

Autre conséquence, apparue avec l’arrêté du 14 avril 2017 sur les formations, les générateurs de catégorie B8° sont également soumis à formation d’entrainement (article 2 4ème alinéa de l’arrêté du 3 août 2007). La commune doit assurer aux agents qui en sont porteurs, deux séances de formation par an, sans intervention du CNFPT, avec obligation d’adresser un rapport annuel au préfet. Rien n’est précisé quant aux formateurs ou sur la durée. Le système est le même que pour les bâtons.

Pour les communes, ce classement en B8° risque d’être vécu comme une contrainte matérielle, d’organisation et financière de plus. Face à ces obligations, il n’est pas impossible que des maires décident d’opter pour un équipement de gazeuses de moins de 100ml (aucune formation…) ce qui pourrait préjudicier à la sécurité des agents.

Le contenu des formations pratiques

A ceux qui objecteraient qu’une formation de 6 heures est trop longue voire inutile, on rappellera qu’un générateur d’aérosol est une arme, qui peut entrainer une aggravation de la qualification pénale de faits de violences volontaires en cas d’usage par l’agent. De plus, il existe des instructions sur l’usage des gazeuses en police nationale ou en gendarmerie qui précisent les spécificités des différents produits, les moyens de limiter l’impact pour l’agent utilisateur, les points à surveiller en cas d’usage (produit décontaminant, suivi de l’état de santé….). Un usage simultané de générateur d’aérosol, produit en général inflammable, et du pistolet à impulsions électriques présente également un risque de brûlures pour la personne qui en ferait l’objet. De telles informations, sans oublier peut-être le devenir des générateurs entamés, vidés ou périmés, pourront utilement être présentées au cours de cette formation d’une journée.

Il est bien évident que la multitude d’agents porteurs et l’actuelle implication des moniteurs en maniement des armes dans les formations préalables ou de transition (passage au pistolet semi-automatique 9 mm) risquent de compliquer la mise en place des formations.

Focus sur un autre apport du décret : un changement de numérotation pour la catégorie D

La loi du 26 février 2018 avait acté la disparition de la catégorie D1°(armes soumises à enregistrement) avec un basculement des armes et matériels concernés en C (procédure de la déclaration). Le décret du 29 juin 2018 met en œuvre, à compter du 1er août 2018, cette modification, avec une conséquence pratique : les armes et matériels de catégorie D2° (a, b, c, d…), deviennent les armes et matériels de catégorie D (a, b, c, d…). De ce fait, l’article R512-11 du CSI, qui liste les armes de dotation possibles en police municipale, est modifié en conséquence à compter du 1er août 2018, sans qu’il y ait toutefois d’impact sur les armes en pratique.